Le débat sur l’identité nationale censure les mauvaises réponses
Un peu méfiante mais toutefois curieuse d’expérimenter cette initiative-là, je me suis lancée sur le site dédié au débat sur l’identité nationale pour y apporter ma pierre. J’ai écrit ce que je pensais spontanément, sans chercher à déguiser ma pensée : franche et critique, mais ni agressive ni insultante.
J’ai coché la case « j’accepte de rendre publique ma contribution » puisque cela correspondait à mon désir de débat - et non de confidences.
Envoyée à 9h 30 ce 3 octobre, elle n’a pas été publiée. J’ai dû faire « l’objet d’une modération », car les contributions du 3 octobre qu’on peut lire chronologiquement, de 00h jusqu’à midi ne font pas figurer la mienne.
Heureusement, j’avais pris mes précautions pour que mes cinq petites phrases ne soient pas perdues à jamais. Car à la lecture des contributions déjà publiées ce 3 octobre, je m’étais vite aperçue que tout propos d’opposition forte était écarté. Tout y est aseptisé : les contributeurs souhaitent que l’identité nationale nous ramène à plus d’obéissance aux lois, d’autres nous exhortent à retrouver la notion de devoir ; un autre a l’audace de conseiller timidement aux politiques de montrer l’exemple, enfin un seul évoque très frileusement l’Europe, au détour d’une phrase. Mais on n’y trouve aucune remise en cause de la notion même de l’identité nationale, notion qui appartient pourtant au nationalisme.
J’y avais vu aussi la mention « les contributions font l’objet d’une modération ». Alors, soigneusement, j’avais fait un copier-coller dans un fichier de traitement de texte et hop !, enregistrement de cette trace sur le disque dur, au cas où…
J’ai bien fait ! Ma contribution n’a pas été publiée. Il s'agit donc d'un débat truqué, qui ne respecte aucunement la liberté d'expression, et qui révèle ainsi son statut de propagande.
La voici donc, comme envoyée sur le site du Grand Débat, et censurée :
Bonjour,
Réfléchir à une identité nationale hypothétique, c'est faire le lit du nationalisme, en douceur, l'air de rien. Notre identité est toute personnelle, toute intérieure, et si elle devait s'apparenter à autre chose qu'à l'intime, ce serait à l'Europe. Ce débat-là s'oppose à l'idée de l'Europe qu'on a essayé de faire passer au moment de voter sa constitution. Maintenant que c'est acquis, on nous organise un joli petit repli sur nous-mêmes. On n'est plus à une contradiction près dans ce pays.
Cordialement
Agnès