Les féministes musulmanes
Elles existent. Elles revendiquent. Elles tiennent des congrès. Le dernier (le troisième) a eu lieu à l’automne 2008 à Barcelone. Loin des médias et des analyses des journalistes occidentaux. Pourquoi ? Parce qu’il est de bon ton de convaincre la femme occidentale que son statut n’est pas si sombre et qu’elle n’a pas à se plaindre. On nous met alors en avant le sort peu enviable de certaines musulmanes, qui, elles, auraient de quoi se rebeller et ne le font pas. Le féminisme serait un luxe tout occidental, fabriquant des hystériques et des castratrices.
Le troisième congrès des féministes musulmanes nous prouve que le « féminisme » n’est pas une fantaisie, qu’il se décline dans tous les pays (13 étaient représentés à Barcelone), et pour chacun d’eux, le mouvement se différencie selon les habitus et la culture en place (lutte contre la lapidation au Niger, contre l’exclusion dans les débats publics en Malaisie, contre les certificats de virginité délivrés en France à des familles de jeunes filles musulmanes). À Barcelone, les féministes ont demandé à « dissocier le patriarcat de l’Islam, à se voir offrir de nouvelles perspectives féminines en matière de pratique religieuse : droit à l’interprétation des textes sacrés, de participer aux prières et même d’officier dans des prières mixtes. »
Les féministes musulmanes sont persuadées que c’est « un ancrage social des préjugés », et non la religion du coran elle-même – quand le texte est correctement lu -, qui est cause de leur oppression. Cela reste sujet à débats, mais cela n’enlève rien à la pertinence de leurs positions et de leur combat.
Source : Sciences Humaines d’avril 2009, rubrique Actualité.