Les violences après une prise d’alcool
Une étude d’une équipe grenobloise dirigée par Laurent Bègue, de l’université Pierre Mendès France, relatée par l’Express le 19 septembre, présentée en conférence de presse de la Direction générale de la santé (page 15 du document pdf) ce même jour, enfin publiée en janvier 2009 dans le Journal of Experimental Social Psychology, a été menée sur les liens entre alcool et violence. Elle semble montrer que les réactions de violence ne sont pas entièrement dues à la prise d’alcool (effet pharmacologique), mais aussi à la croyance qu’on est alcoolisé.
Les expérimentateurs avaient pour cela constitué, avec une centaines de participants, deux groupes d’hommes non alcooliques. Ils ont fait absorber aux uns de l’alcool à leur insu, et aux autres des boissons inoffensives en leur faisant croire qu’elles étaient alcoolisées.
Puis une provocation a été menée par un comparse. Les hommes qui ont réagi violemment à la provocation étaient ceux qui croyaient être imbibés, alors qu’ils avaient absorbé un placebo. Ceux qui avaient bu de l'alcool (mais croyaient être sobres) sont restés plus calmes.
Selon l’équipe de Laurent Bègue, ce placebo « peut également être interprété comme une stratégie volontaire de la part des participants qui, sachant qu’ils ont consommé de l’alcool, considèrent qu’il est moins inacceptable de se montrer agressifs face à quelqu’un qui les provoque ». Les réactions à l’alcool sont très différentes d’un individu à l’autre. Elles dépendent de facteurs pharmacologiques, mais aussi de multiples facteurs sociaux : rapport à la délinquance, idée de virilité, proximité et influence d’autres personnes alcooliques, intégration à une bande. Tous ces facteurs poussent les buveurs à une conduite normée.
L’alcool rendrait donc plus agressif par l’idée que l’on s’en fait que par ses effets sur le cerveau.
Il serait interprété comme une excuse. La loi a d’ailleurs très longtemps conforté cette idée, en qualifiant la prise d’alcool comme « circonstance atténuante », dont le sens commun s’est emparé. Cette atténuation est d’ailleurs encore en vigueur en Italie, pour les cas d’ivresse non habituelle.
La loi du 5 mars 2007 a rompu avec cette idée. Elle a alourdi les peines pour les infractions « commises sous l'emprise manifeste d'un produit stupéfiant ou en état d'ivresse manifeste ». Elle a également introduit une notion de « circonstance aggravante » pour les infractions commises sous l'emprise de l'alcool, en inversant le raisonnement qui jusque-là avait tendance à exonérer partiellement les auteurs de délits en état d'ébriété au moment des faits. Pour Laurent Bègue, la piste à suivre est de « délégitimer » les prises d’alcool.